Elles attirent toutes les convoitises et constituent à elles seules une représentation sociale de la permaculture. Mais les buttes sont dans la plupart des cas inutiles, voire contre-productives. Voici pourquoi.
[…] la butte ne peut être réponse universelle aux besoins de toutes les plantes, seulement une réponse au milieu quand il est très humide ou inondable, trop sec et sableux, ou lorsque l’épaisseur de sol nourricier est mince. Dans la plupart des cas, sous nos latitudes, l’édification d’une butte de culture est un acte de colonisation radicale, révélateur d’un instinct de domination sur la nature.
Christophe Gatineau, « Buttes de culture, buttes de permaculture, sont-elles une alternative à la crise agricole ? »
Pour des cas très particuliers
L’origine des buttes de permaculture vient des travaux de Sepp Holzer, agriculteur autrichien, qui exploite des terres en altitude sous un climat extrêmement particulier (qui n’est très certainement pas le vôtre). Trop humide, trop sec ou pas assez profond, les buttes de culture permettent de créer artificiellement un sol lorsque celui-ci n’est pas vraiment favorable à une culture potagère.
Pour savoir si votre lieu nécessite la création éventuelle de buttes de culture, creusez un trou d’un mètre de profondeur et observez. Christophe Gatineau l’explique simplement de la manière suivante :
« Très simple à faire soi-même, il suffit de creuser à la pelle un gros trou d’au
moins un mètre de profondeur, puis d’observer la coupe afin d’estimer les communautés qui y vivent, la profondeur des galeries et des racines, la composition physique… Si d’emblée vous avez les pieds dans l’eau, ou si la roche mère est à 30 cm de la surface, d’abord il vous sera difficile de creuser à un mètre sans maillot de bain ou marteau piqueur, ensuite vous n’aurez pas d’autres choix. »
Mon expérience : au lieu de faire des buttes, je fais des planches en délimitant des zones pour ne pas marcher dessus et tasser le sol, puis je me concentre sur celles-ci afin de favoriser la vie du sol du mieux que je puisse. Pour créer une nouvelle zone dans mon jardin, j’enlève la couche supérieure de gazon si je suis en forme. Sinon, une première couche de compost assez épaisse viendra étouffer tout ça.
Je passe ensuite un bon coup de grelinette si nécessaire (sol tassé) et j’amende avec du fumier de cheval et des coupes de végétaux divers (déchets de cuisine par exemple) pendant tout l’hiver que je recouvre avec ce que j’ai sous la main (feuilles, tontes, paille, foin, etc.). Une fois la culture en place, je couvre le sol continuellement pour enclencher un compost de surface. Si je suis pressé je démarre souvent une planche avec des fabacées (fèves, haricots, pois …), sinon avec un engrais vert (phacélie, moutarde, vesce, …) qui auront tous l’avantage d’enrichir le sol en fixant l’azote de l’air et favoriseront le développement de la vie du sol avant les premières cultures potagères.
Un travail éreintant ou très consommateur d’énergie
Construire une butte de culture est très fatiguant. Si vous souhaitez vous passer d’un engin mécanique utilisant du pétrole il faudra utiliser vos mains et la tâche peut s’avérer ardue si d’une part vous êtes seul, et d’autre part si vous souhaitez cultiver une zone relativement importante.
Mon expérience : j’ai réalisé seul trois buttes de 5m2 chacune, lorsque j’ai décidé de commencer mon potager, et j’ai encore le souvenir de la pénibilité de la tâche. Plus jamais.
Un assèchement de la terre
En surélevant la terre à des niveaux parfois importants (70 cm) le sol créé dans la butte va drainer l’eau très facilement et s’assécher en causant un stress hydrique aux plantes. Ce stress peut alors favoriser la montée en graines et réduire considérablement les récoltes. Sans eau, la vie du sol va également se retrouver appauvrie. Il faudra alors arroser davantage, créant un cercle vicieux.
Mon expérience : la butte se tasse rapidement et s’assèche. Les plantes nécessitent un apport d’eau plus important. Un système d’arrosage est vite nécessaire en été.
Un refuge aux rongeurs
Lorsque l’on construit une butte selon les standards de YouTube, on décaisse la zone d’une bonne dizaine de centimètres puis on y ajoute différentes tailles de bois. On vient combler ensuite les espaces avec du bois plus fins puis on procède à la mise en place de la fameuse « lasagne » (couches carbonées et azotées) pour recouvrir le tout d’une couche de terre et un paillage.
Mon expérience : je me suis aperçu très rapidement que j’avais en fait construit le refuge parfait pour les campagnols du coin. Au bout d’un an la butte était mitraillée de petits trous par lesquels allaient et venaient ces petits rongeurs pour se nourrir, et notamment des racines de mes légumes.