Un sol vivant

Les plantes annuelles colonisent le sol. Lorsqu’elles se flétrissent et meurent à la fin de leur saison de croissance, leurs restes tombent sur le sol et servent de paillis dont se nourrissent les bactéries et les vers de terre. Ce cycle se répète chaque année, avec la formation de matière organique et la création d’humus. Voici ce qu’il faut faire pour reproduire ces conditions.

Des sols vivants sains sont la clé d’un jardinage sans travail du sol. Le fondement d’un sol vivant et sain est la vie qu’il héberge. Nous devons en prendre soin et l’améliorer. Nous le faisons en protégeant les sols comme le fait la nature. Sinon, nous avons un sol nu qui est compacté par la pluie et le vent. Le soleil cuit le sol, le vent le sèche et l’emporte. L’eau ne peut plus s’infiltrer dans le sol, car le sol est compacté et sans air. La suite vous la connaissez : inondations, baisse de la fertilité du sol, etc. Avec une interaction minimale et une bonne protection des sols, nous pouvons éviter cela – mieux encore, nous pouvons améliorer les sols au fil du temps et obtenir des récoltes de plus en plus productives. Pour cela il faut vous créer cet or noir dont parlent tous les maraîchers : du compost.

Ne pas perturber le sous-sol et encourager le travail biologique

Comme on peut le voir partout en France, pour mettre en place des plantes annuelles, il faut intervenir mécaniquement pour préparer les plates-bandes en vue de l’établissement des futures cultures. Mais travailler en profondeur perturbe la structure du sol. Dans votre petit potager en permaculture oubliez donc, si possible, motoculteur et autres engins qui vont certes ameublir la terre, mais fortement perturber la vie qu’y trouve.

Dans cet écosystème intestinal – parce qu’il est fondamental de
considérer qu’un sol vivant fonctionne comme un intestin inversé, un gigantesque digesteur où les racines des plantes puisent, tirent ou aspirent leur nourriture à l’image de notre paroi intestinale –, le ver de terre est la colonne vertébrale, le poumon, la tête pensante et le cœur du système.

Christophe Gatineau, « Éloge du ver de terre » (éditions Flammarion)

Un sol non perturbé permet aux vers de terre de creuser leurs galeries et assure l’aération et le drainage. Ils jouent un rôle extrêmement important dans une structure saine du sol et remplacent le travail mécanique par un travail biologique. Pour vous rendre compte de l’importance des vers de terre, faites un tour sur YouTube pour y entendre Christophe Gatineau vanter leur mérite.

Si vous ne compromettez pas les vers de terre, les microbes et les autres organismes du sol peuvent effectuer une grande partie du travail nécessaire pour créer et maintenir une terre meuble et fertile. Cependant, si vos sols sont biologiquement morts, ces microbes doivent venir de quelque part et c’est pourquoi nous sommes parfois obligés de nourrir le sol avec de la matière organique décomposée déjà biologiquement active et riche en microbes bénéfiques : le compost.

Donnez vie à votre sol grâce au compost

Un bon compost fournit à la fois la matière organique pour la construction du sol et l’engrais pour les cultures, et, plus important encore, il est rempli d’organismes qui déclenchent l’activité biologique. Il inocule à votre sol des microbes qui vont digérer les nutriments présents dans le sol et nourrir vos plantes.

A ne pas confondre avec le terreau, le compost est l’ingrédient clé pour la construction et le maintien d’un sol sain. En raison de ses caractéristiques particulières, le compost ne peut pas être simplement remplacé par du fumier, des engrais naturels ou des engrais verts. Si vous démarrez votre potager et que vous souhaitez être productif, le compost rendra rapidement vos sols fertiles.

Entretenir la vie du sol avec du paillis

Une zone de mon potager où l’on peut voir de la paille recouvrir la plupart des zones de culture. Attention, cela attire les limaces. Il y a beaucoup de façon de couvrir le sol, en premier lieu avec les végétaux eux mêmes.

Le paillis est inestimable ! Grâce à lui, nous pouvons retenir l’humidité du sol, et le sol n’est pas sursaturé d’eau ou au contraire complètement sec. Au lieu de cela, il devient meuble, aéré et fertile. Vivant !

Une fois que la biologie de votre sol fonctionne, vous devez le nourrir pour qu’il puisse en retour nourrir vos plantes. Il existe plusieurs façons d’apporter de la matière organique dans votre potager en permaculture. L’une des plus faciles est d’utiliser des tontes de gazon, des feuilles, de la paille ou des plantes de couverture et, bien sûr, du compost. Il ne s’agit pas de gaver le sol comme une oie, mais de s’assurer, si nécessaire, qu’il ait de quoi fonctionner correctement.

Le paillis est ensuite laissé à la surface pour se décomposer. L’ajout de cette couche de matière organique enclenche un « compostage de surface », où vos zones de culture deviennent alors de grandes zones de compostage auto-fertiles. Ensuite, sous l’action des vers de terre, des bactéries, des champignons et des insectes, la matière organique est lentement décomposée et libérée dans le sol, fournissant ainsi des nutriments à votre potager.

On voit rarement de paillage dans les cultures professionnelles à grande échelles car il rend très difficile le semis direct (le fait de semer les graines directement dans le sol sans passer par l’étape en godets par exemple) et complexifie la gestion mécanisée des zones.

Utiliser la rotation et l’association des cultures pour imiter la diversité et prévenir les maladies

Un exemple d’association : des haricots nains sont plantés au pied des tomates.

Avec la rotation des cultures, vous pouvez imiter la diversité des plantes annuelles qui poussent sur un champ nu. Les différents systèmes racinaires des plantes pénètrent le sol à différentes profondeurs, améliorant ainsi sa structure.
En assurant la diversité des cultures et en les alternant, vous permettez au sol de continuer à produire sans être vidé de ses nutriments, tout en éliminant simultanément un certain nombre de maladies et d’insectes nuisibles qui surviennent souvent lorsqu’une espèce est cultivée en continu sur une même zone.

Les associations de cultures sont également très intéressantes, mais peuvent vite devenir un vrai casse-tête si vous disposez d’une surface réduite. Néanmoins des associations faciles à réaliser sont possibles dès lors que l’on prête attention à la famille de légumes que l’on installe sur place.


Quels problèmes éventuels avec le paillis ?

Le paillage avec des matières organiques fraîches, non décomposées et grossières (gazon, foin, paille, feuilles, fumier) donne beaucoup de nourriture et des conditions de vie optimales pour les limaces et les escargots. Il peut attirer et abriter également d’autres animaux plus gros comme les rongeurs, ce qui peut représenter un défi pour les jardiniers. On peut ainsi éviter le paillis frais là où il existe déjà des problèmes de limaces, de campagnols, etc. S’il n’y a pas de tels problèmes, on peut utiliser par exemple de la tonte de gazon séché, du foin, de la paille, des feuilles … en bref, tout ce que vous avez sous la main en matière organique séchée pour couvrir le sol.

J’ai la chance d’avoir beaucoup d’arbres autour de mon potager. En automne les feuilles mortes tombent naturellement sur le sol et se dégradent tout l’hiver. Pour les zones de culture intense qui sont mal recouvertes par ce paillis naturel, j’utilise de la paille et du foin. Ce dernier est plus nourrissant pour le sol mais se dégrade plus rapidement, la paille quant à elle comble aisément les espaces aux pieds des plantes et protège aussi très efficacement la surface du sol tout en maintenant une bonne humidité. Mais attention aux limaces, la paille qui commence à se décomposer les attire beaucoup. Au printemps lorsque les pluies sont encore présentes, je n’hésite pas à dépailler le sol, pour d’une part le réchauffer un peu, et d’autre part éviter que les limaces ne s’y baladent trop. Faîtes-vous votre expérience, testez plusieurs méthodes et vous verrez bien le résultat.

Quand faut-il pailler à nouveau le sol ?

Cette zone avec des épinards en fin de cycle mériterait par exemple un bon paillis.

Dès que le paillis commence à disparaître j’en remets immédiatement, voire même avant. Généralement c’est souvent l’apparition d’herbes indésirables qui me donnent le signal. Au lieu de les arracher une à une, ce qui s’avère souvent très fastidieux, je les couvre d’une bonne couche de paillage.

Il est beaucoup plus facile de pailler un sol qui a, soit des légumes déjà bien développés pour y insérer de la matière entre les pieds, soit aucune culture. Il faut donc impérativement pailler avant ou à la fin des cultures pour éviter d’endommager les jeunes plants déjà en place.

La plupart du paillage que je fais est réalisé après la récolte des légumes d’été, en automne et avant l’hiver. De cette façon, la terre de mon potager est préparée pour une nouvelle saison avant l’hiver et elle est prête plus rapidement et en meilleur état au printemps. L’hiver peut être très dommageable pour le sol si nous ne le protégeons pas. Il peut aussi être une période de repos et d’alimentation du sol. Le permaculteur nourrit finalement le sol et non les plantes, prenez-en grand soin et les plantes vous le rendront.